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Qu’est-ce que la réserve héréditaire ?

La réserve héréditaire est la part de la succession que la loi réserve à certains héritiers qui sont appelés « héritiers réservataires ».

A l’inverse, la quotité disponible est la part de la succession dont le défunt pouvait disposer librement de son vivant par donation ou testament, par exemple en avantageant un héritier ou en gratifiant un tiers.

Prenons par exemple, la situation d’un parent laissant un ou plusieurs enfants, en l’absence de conjoint survivant.

Cette situation est prévue par l’article 913 du code civil.

  • En présence d’un seul enfant, celui-ci a une réserve de 50%  des biens de son ascendant, lequel pouvait disposer librement de l’autre moitié de son patrimoine.
  • En présence de deux enfants, leur réserve héréditaire est de 1/3 chacun des biens de leur ascendant. Cela signifie qu’il pouvait disposer librement du dernier tiers de son patrimoine.
  • Enfin en présence de trois enfants et plus, la réserve globale est des 3/4 du patrimoine de l’ascendant, lequel pouvait disposer du dernier quart au profit de tout tiers.

Le rapport à la succession est, avec la réduction, l’un des mécanismes qui permet de préserver la réserve des héritiers.

Lors du règlement d’une succession, tout héritier venant à la succession doit « rapporter » à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt.

Il doit notamment rapporter les dons qu’il a reçu « en avance sur la succession » ou « en avancement de part successorale ». Jusqu’en 2006 on utilisait l’expression « en avancement d’hoirie ».

A l’inverse il n’a pas à rapporter les dons qui lui ont été faits hors part successorale, donc par prélèvement sur ce qui n’est pas dans la réserve héréditaire mais qui est disponible : c’est la « quotité disponible ».

Pourquoi une donation simple est rapportable à la succession alors qu’une donation-partage n’est pas rapportable à la succession ?

La donation-partage est à la fois une donation et un partage anticipé de la succession du donateur.

Elle est prévue par les articles 1076 et suivants du code civil.

Contrairement à une donation simple, la valeur des biens donnés est arrêtée à la date de la donation-partage.

Au contraire dans une donation simple, sauf clause particulière, il faudra considérer les biens donnés pour leur valeur à la date du décès du donateur et non pas à la date de la donation. Il y a donc lieu de les « rapporter » à la succession pour la valeur de ces biens à la date du décès.

Les conséquences d’une donation simple ou d’une donation partage lors du règlement d’une succession

Prenons un exemple :

Une donatrice a 200 000 € en espèces qu’elle souhaite donner à ses deux filles. 

Elle donne 100 000 € à chacune de ses deux filles par virement sur leur compte bancaire.

L’une des filles achète un bien immobilier pour 100 000 €.

L’autre fille achète des actions en bourse pour 100 000 €.

 

La donatrice décède et laisse un patrimoine évalué à 500 000 € à la date de son décès.

A date du décès de la donatrice  :

– le bien immobilier donné vaut 300 000 €.

– les actions en bourse données valent toujours 100 000€ le marché ayant fait du « sur-place »

 

Dans une première hypothèse nous considérons que la donatrice a fait une donation simple, par un don manuel réalisé par le virement sur les comptes bancaires de chacune de ses deux filles. 

Dans une deuxième hypothèse nous considérons qu’elle a fait une donation-partage devant notaire au profit de ses deux filles signataires de l’acte. 

Le règlement de la succession ne se fera pas à l’identique dans l’une ou dans l’autre de ces deux hypothèses.

Première hypothèse : donation simple et rapport à la succession

Les deux filles vont devoir rapporter à la succession les donations qu’elles ont reçues. 

Le rapport se fait en valeur et non pas en nature : la fille qui a acheté le bien immobilier à 100 000 € et qui vaut 300 000 € au décès de sa mère ne va pas rapporter le bien immobilier dans la succession.

Par contre, en vue du partage civil entre les héritières, le notaire va tenir compte de la valeur de la donation mais pour sa valeur à la date du décès.

Donc la fille qui a acheté le bien immobilier rapporte 300 000 € et non pas 100 000 €.

La fille qui a acheté des actions en bourse rapporte 100 000 € puisque la valeur est inchangée.

Pour déterminer les droits de chacune, il faut additionner la valeur du patrimoine de la défunte à son décès ( 500 000 €) et les rapports de 300 000 € et de 100 000 € soit au total 900 000 €.

Les deux filles ont donc le droit chacune à 450 000 € en l’absence d’autre héritier.

La première fille recevra donc 450 000 € – 300 000 € soit 150 000 €.

La seconde fille recevra donc 450 000 € – 100 000 € soit 350 000 €.

Pourtant à l’origine les deux filles ont chacune reçu la même somme de 100 000 € par donation simple !

Deuxième hypothèse : donation-partage et absence de rapport

Dans l’hypothèse où la mère aurait fait une donation-partage de 200 000 € à chacune de ses deux filles, le partage a déjà été fait.

Les héritières, au décès de leur mère, sont alors dispensées de « rapporter à la succession » les donations de 100 000 € qu’elles ont chacune reçues.

Le rapport se faisant au moment du partage, il n’y a pas de rapport puisque le partage a déjà été effectué lors de la « donation – partage ».

La mère laissant un patrimoine de 500 000 € comme nous l’avons vu précédemment, chaque enfant a vocation à recevoir 250 000 €.

Cet exemple simple démontre qu’une donation-partage, contrairement à une donation simple, peut permettre d’assurer l’égalité entre les héritiers.

Au contraire, une donation simple ou un don manuel sans formalisme particulier sera rapportable pour la valeur au jour du décès et sera susceptible de créer des difficultés lors du règlement de la succession.